Arbre de papier, arbre à poissons, ramures noires et nues
contre le ciel, frondaisons vibrantes, en faire le tour, peau contre l’écorce,
j’ai au coeur deux ramures qui chantent avec le vent, du bois mort qui craque
sous les pas, les rameaux de buis sur la cheminée de mon père, les arbres des vergers,
petits, râblés, les platanes et marronniers immenses des places et promenades, l’arbre aux mille feuilles d’or du
jardin des plantes, les racines sous la terre, celles qui affleurent, qui
serpentent, feuilles colorées de l’automne, pollen et chatons, rien à voir, ne
pas confondre feuilles, fleurs fruits, tout confondre, les branches qui remuent
dans le vent, le feuillage au dessus de mon corps allongé dans l’herbe,
derrière le ciel bleu. Pas bleu, il paraît atmosphère, atmosphère. Les cerises
sont rouges, presque noires c’est comme ça que je les aime et croquantes, plus
de châtaigniers à la Toussaint, ifs des cimetières. Que planter sur la tombe de
ma mère. Les baobabs que l’on n’a pas vus, qu’on ne verra pas, les cèdres du
Liban, celui de la Pépinière, Harmonie Ouest qu’ils disaient, le noyer de la
maison des Causses, qu’il aurait fallu déraciner et c’est pas sûr, tout ce
qu’il aurait fallu détruire de plus, moi avec mon petit couteau, lui avec sa hâche ?
Pas si sûr. Les balançoires accrochées aux branches, les arbres du bord de la
rivière, qui s’ébrouent vers l’eau, le rose déployé des magnolias, la neige
délicate des cerisiers et des pommiers, les oranges trop mûres dans les arbres
de Sartène, la forêt domaniale de mon enfance. Je suis une fille des arbres, je
ne fais que passer. Mademoiselle Sunny Moon, depuis le temps a traversé. L’arbre
tendu entre terre et ciel, on pourrait jouer à la marelle.