samedi 18 novembre 2017

J'aurais voulu t'écrire un truc drôle Catherine,
Je sais en faire des pirouettes moi aussi, désosser les sardines, gratter, retourner les boîtes. Je suis une écuyère.
J'aurais voulu t'écrire ça, les trucs qu'on cache,  ce qui s'empile et va se casser la  binette,  les choses qui râpent, les vieux trucs en bazar dans l'armoire,  les serpents qui se mordent la queue et ceux qui sifflent sur nos têtes.
On aurait collé les mots tout dans le désordre, ça aurait pu en faire des paillettes d'atelier, des cotillons.
On verrait les copains descendre l'escalier en glissant.
On se retournerait en s'esclaffant. Mais pas trop.
On prendrait soin de leurs hématomes parce qu'on est bonnes filles quand même.
J'aurais cherché des poux dans la tête des voisins, appliqué mes deux mains sur les vitres, j'aurais recu le cheval bleu et son chapeau de paille. M. Legrand se prenant pour Chagall. Ou Tati on ne sait plus où donner de la pipe ici.
Tu vois j'aurais pu t'écrire un truc drôle. Je me serais appliquée, j'aurais défait les vieux pansements qui trainent, tout nettoyé en dessous une fois pour toutes. Car je suis une grande joueuse. J'y serais allée au karsher, qu'on n'en parle plus.
Mais je sais pas, y en a qui toussent Catherine. Y a les gens qui sont là, et ceux qui sont plus là et ceux qu'on sait même pas s'ils seront là demain.
On pourrait les barioler, les recouvrir de couleurs, on ferait des ribambelles de papier, des guirlandes. Ça serait trop drôle ici. Ce serait la fête. On pourrait même entendre un vieil accordéon désaccordé. Ça ou un orgue de barbarie si on est en forme.
Ça serait drôle, on aurait des chaussettes dépareillées, on danserait, on ferait comme les filles de Redon qui tapent du pied quand l'amour les prend.
J'aurais voulu t'écrire un truc drôle Catherine.
J'aurais pu m'appliquer. J'avais bien 10 minutes.